MONOLOGUE DU NOUS
——————————————————————————————————————————————————————————————————————————————————
Mise en Jeu par Stéphane Laudier, avec Jean Marc Bourg
Production V2 Schneider, Compagnie conventionnée par le département de l’Herault
Merci à PBM Distribution / Crédit Photo Philippe Dollo
Rendez-vous à 19h30 à la Baignoire
——————————————————————————————————————————————————————————————————————————————————
Monologue du nous : ce titre dit un échange impossible, et cependant les Nous-Quatre qui s’expriment et agissent dans son cadre le font bien en le respectant. Ils ont choisi la résistance et de la pratiquer sans illusions. Mais au nom de quoi puisqu’il n’y a plus ni valeurs ni règles ? Il ne leur reste que le désespoir : peut-il fournir l’excitant révolutionnaire qu’a seul fourni, et : depuis toujours, son contraire ?
Bernard Noël a longtemps buté sur ce « Nous ».
Expérimentateur de toutes les formes, il a finalement choisi la fable. Abstraite d’abord, désincarnée, au début d’un récit qui devient presque un thriller, dans lequel le « Nous » prend peu à peu corps. Une fable politique à la fois précisément ancrée dans une actualité contemporaine mais qui nous brouille les filiations, les ressemblances. « Nous » – premier et dernier mot du livre – est ici un groupe de militants d’un mouvement révolutionnaire qui ne croit plus à la révolution. Ni aux lendemains qui chantent.
Le texte de Bernard Noël est une fable politique noire qui interroge le désespoir absolu comme ultime valeur révolutionnaire recevable.
Il y a dans ce livre autant de Nous que de phrases.
La contrainte stylistique que s’impose l auteur, consistant à commencer chacune d’elles par ledit pronom, entraîne d’emblée son écriture dans un mouvement vertigineux.
Monologuer, c’est parler avec soi-même. Si l’on décale un peu le genre, c’est parler avec l’Autre comme s’il était soi-même. Cet exercice, qui décale la parole, révèle tout à coup qu’il permet à l’écriture de s’exprimer crûment dans un face à face avec son sujet.
Bernard Noël a poursuivi cette confrontation en passant du On au Vous, du Il au Tu, du Je au Elle, dans différents livres mais il a longtemps désespéré de jeter le Nous dans ce jeu où prendre la tête des phrases, c’est risquer l’auto-destruction. Finalement, après bien des années dans l’impossible, le Nous a tiré derrière lui une histoire de violence et de désespoir qui est aussi une fable politique d’assez mauvais genre pour servir de fable d’actualité puisqu’il y est question de désespoir politique et de terrorisme…
////////////////////////////////
Bernard Noël est considéré comme l’un des écrivains les plus importants de sa génération. Salué par Aragon, Mandiargues et Blanchot, son œuvre, immense par son engagement et son exigence, compte plus d’une cinquantaine de titres et de très nombreux livres d’artistes.
Dernières parutions : Avec Edith Azam, «Retours de langue»,
Éditions Faï Fioc, 2018. «Sur le fil ténu des départs», Dumerchez, éditeur, 2019.